Victor Dimino pêchant à la mouche en coup droit sur la rivière San Juan, Nouveau-Mexique, USA (Photo Thierry Willems)
Techniques pour lancer une mouche
Coup droit et rouler

J’ai bien conscience qu’en reprenant le b.a.-ba du lancer mouche, je vais en lasser plus d’un : Mais on sait tout ça ! On le sait parce qu’on nous l’a appris. Mais savoir ne signifie pas qu’on a compris. On fait plein de choses sans savoir pourquoi : on obéit. Chercher à comprendre, c’est commencer à désobéir, disait Jean-Michel Wyl. Désobéir, c’est ce qu’ont fait ceux qui ont essayé de comprendre ce qu’ils faisaient, ce qui se passait, pour désobéir aux instructions qu'on leur avait données et mettre au point de nouvelles techniques de lancer. Il n’existe donc pas une, mais plusieurs techniques pour lancer une mouche. Certaines restent peut-être à inventer ou à réinventer. Mais elles peuvent se résumer à deux techniques : le lancer par-dessus la tête et le rouler. Tout le reste n’est que des variantes. Et toutes ont un point commun : la soie doit être tendue.

Le lancer par-dessus la tête (Overhead Cast) encore appelé coup droit ou revers

Le lancer en coup droit consiste, rappelons-le, à arracher la mouche de la surface de l’eau dans un mouvement lent au départ, qui s’accélère progressivement jusqu’à bloquer la canne à une position dépassant légèrement la verticale, disons à 13 heures pour reprendre la position des aiguilles d’une montre. Bloquer la canne est indispensable pour bien actionner la canne. Si vous gardez, le long du corps, le coude du bras qui tient la canne, le blocage s’obtient naturellement lorsque l’avant-bras vient heurter le biceps. Il faut alors attendre que la ligne (soie) se déploie en arrière avant de relancer en avant. Pendant ce temps, il est recommandé de lever le coude, non pas pour boire un coup, mais pour accompagner la soie qui file en arrière et préparer le lancer avant. Il est important de bien attendre pour correctement charger la canne dans le lancer avant. On sait que la soie est déployée en arrière, quand on la sent tirer sur la canne. C’est pourquoi c’est une mauvaise idée que d’utiliser une soie trop légère pour la canne.

Quand on sent la soie tirer en arrière, on relance en avant, en abaissant le coude et en bloquant la canne à 10 heures cette fois. Le blocage est toujours nécessaire pour bien actionner la canne. Ensuite, soit on abaisse la canne pour accompagner la soie et la poser sur l’eau, soit on relance en arrière : c’est ce qu’on appelle alors un faux lancer. Le faux lancer sert à gagner en distance en relâchant un peu de soie à chaque fois qu’on la sent tirer sur la canne. Le dernier lancer avant s’appelle le shoot final. Il consiste à laisser filer la soie dans les anneaux pour gagner en distance.

Afin d’accélérer la soie, on exerce avec la main qui tient la soie, une traction lors de l’arracher de la soie : c’est la simple traction. On peut lors du lancer arrière, accompagner la soie qui file en arrière et la rattraper pour exercer une nouvelle traction lors du lancer avant : c’est la double traction. Tout lanceur expérimenté pratique systématiquement et naturellement la double traction. Elle n’est pas naturelle pour le débutant, car il est trop raide. Il faut se décontracter, s’assouplir. Je compare assez volontiers la double traction à un mouvement de yo-yo.

La question que se pose le débutant est alors : Quand s’effectue le shoot final ? La réponse avec les soies WF est simple : c’est quand on voit que l’on passe de la partie épaisse à la partie fine en arrière de la soie, ce qui, sur certaines soies, est matérialisé par un changement de couleur.

Sur une soie « normale », cela correspond à environ 9 mètres. Mais il y a de plus en plus de soies spécifiques dont le ventre (la partie épaisse) est soit plus court pour pêcher plus vite et dans des endroits où il n’y a pas beaucoup de place pour lancer, soit plus long quand on a davantage d’espace en arrière de soi, pour faciliter le lancer à grande distance, souvent nécessaire quand on pêche en réservoir (lac ou plan d’eau) depuis la berge.

Comme on peut le comprendre, lancer en coup droit nécessite de la place en arrière de soi. Disons que si l’avant de la soie fait 9 mètres, il faut rajouter la longueur du bas de ligne ainsi que la longueur de la canne par mesure de sécurité, soit une quinzaine de mètres au moins. A défaut de quoi, la mouche risque d’attraper un arbre situé en arrière de soi.

Quand on est gêné par de la végétation située du côté de la main qui tient la canne, on peut, au lieu de lancer en coup droit, lancer en revers. On incline alors l’avant-bras de la main qui tient la canne, vers l’épaule de l’autre bras, et au lieu que ce soit le biceps du bras qui tient la canne, qui bloque le mouvement arrière, c’est l’épaule de l’autre bras. Ce n’est évidemment pas très pratique. Certains préfèrent alors apprendre à changer de main, à lancer avec la canne dans la main gauche quand on est droitier, et vice-versa pour les gauchers.

Le lancer en coup droit est très pratique pour lancer une mouche sèche, car il permet lors des faux lancers, de sécher la mouche. Mais quand il y a de la végétation derrière soi, il occasionne pas mal d’accrochages et de pertes de mouches. Et quand on pêche avec des mouches autres que des sèches, sécher la mouche n’est pas un avantage mais un inconvénient.

En présence de végétation en arrière et à proximité de soi, on ne peut pas laisser partir la soie en arrière. Il peut alors être impossible de lancer à moins de pratiquer ce qu’on appelle un lancer roulé.

Le rouler (Roll Cast)

Le rouler se pratique traditionnellement en relevant doucement la canne jusqu’à plus ou moins la position 13 heures du coup droit, coude relevé, et à la rabattre en avant de manière énergique, ce qui a pour conséquence de faire rouler la soie sur l’eau et de relancer la mouche.

Il faut, à ce stade, comprendre qu’une soie va toujours repartir à la condition qu’elle soit tendue. C’est sa tension qui permet de bander la canne et de la faire entrer en action. La soie n’a donc pas à être tendue en arrière du pêcheur comme dans le coup droit. Mais elle a besoin, pour être tendue, de prendre appui sur quelque chose, ce quelque chose étant l’eau bien sûr. On appelle cet appui un « ancrage ».

A condition de bloquer la canne à 10 heures dans le lancer avant, comme en coup droit, il est possible de faire rouler la soie non plus sur l’eau, mais dans l’air. Ce qui présente un énorme avantage : on peut alors gagner en distance. En effet, faire rouler la soie de façon très académique sur l’eau, ne sert à rien puisque ça ne permet que de replacer la mouche à l’endroit où elle était avant le lancer. C’est joli, mais c’est tout.

Finalement, quand on décompose le mouvement du bon rouler, il est très similaire à celui du coup droit. La seule vraie différence est qu’on ne fait pas partir la soie en arrière. Pour cela, le mouvement est lent et continu jusqu’à la position 13 heures, coude levé, et ensuite c’est pareil qu’un coup droit. Pour faciliter l'ancrage, il est préférable d'utiliser un long bas de ligne. Mais ce lancer est aussi grandement facilité par l’usage de soies conçues pour ça, des soies plus lourdes que pour lancer en coup droit, au profil particulier, des soies communément appelées « Spey », mais nous y reviendrons plus tard.

Vous l’avez compris, faire rouler la soie en l’air lors du lancer avant, est l’objectif à atteindre. Mais cela ne suffit pas, car il est impossible de changer de direction sans que la trajectoire de la mouche ne croise celle de la soie, ce qui aboutit à un accrochage de la mouche dans la soie, ou, au mieux, à des nœuds sur le bas de ligne. Il faut donc un mouvement préparatoire au rouler, mouvement communément appelé « Spey Cast ».

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Une truite prise à la mouche sur la rivière San Juan, Nouveau-Mexique, USA (Photo Thierry Willems)

Truite prise à la mouche sur la rivière San Juan, Nouveau-Mexique, USA
(Photo Thierry Willems)



Thierry Willems avec une truite prise à la mouche sur la rivière Taylor, Colorado, USA (Photo Thierry Willems)

Thierry Willems avec une truite prise à la mouche sur la rivière Taylor, Colorado, USA
(Photo Thierry Willems)



Klaus Frimor faisant le shoot final du rouler avec changement de direction appelé Underhand Cast, Rio Gallegos, Patagonie, Argentine (Photo Thierry Willems)

Klaus Frimor faisant le shoot final du rouler avec changement de direction appelé Underhand Cast
Rio Gallegos, Patagonie, Argentine
(Photo Thierry Willems)